Quels outils pour évaluer l’agriculture durable ?
Lors de la conférence des Nations Unies de Rio (CNUED, 1992), les états signataires se sont engagés à mettre au point des stratégies nationales de développement durable et à élaborer des indicateurs de durabilité (Agenda 21 chapitre 40) (Rigby et al, 2000). Quelques années plus tard, la Commission européenne soutient également l'élaboration d'indicateurs de durabilité en agriculture en vue d'abord d'orienter les politiques en faveur d'une agriculture durable puis de les évaluer. Cependant, ces objectifs politiques soulèvent la question de la conception de nouveaux indicateurs pour évaluer le degré de durabilité d'un système de production agricole. Comment traduire de manière opérationnelle le concept de durabilité à l'échelle des exploitations agricoles ?
En France, depuis la fin des années 1990, plusieurs méthodes d'évaluation de la durabilité des exploitations agricoles ont été développées par différents acteurs (recherche, réseaux d'agriculteurs structurés dans les CIVAM, CEDAPA), qui prennent en compte les trois piliers de la durabilité (environnemental, économique, social).
Il ne s'agira pas donc pas décrire LA méthode qui évaluerait le mieux (scientifiquement) la durabilité d'une exploitation agricole, mais bien d'illustrer comment la communauté scientifique mais aussi les acteurs professionnels se sont appropriés cette question de l'évaluation de la durabilité de l'agriculture pour lui donner un sens concret.
Les méthodes actuelles d'évaluation de la durabilité sont présentées dans le tableau ci-après. Elles regroupent la méthode IDEA (Vilain et al., 2000, 2003 et 2008), la Charte de l'Agriculture Paysanne élaborée par la FADEAR, la méthode Arbre (Association Trame) et la méthode du Réseau Agriculture Durable (voir tableau ci dessous). La méthode Arbre est la seule qui n'est pas construite à partir d'indicateurs, ce qui la rend très simple d'utilisation. Les méthodes de l'Agriculture Paysanne et du Réseau Agriculture Durable postérieures à la méthode IDEA en sont d'ailleurs très proches en s'inspirant de certains d'indicateurs.
En France, cette question sur l'évaluation durabilité a conduit à une réflexion scientifique sur la manière d'appréhender la durabilité au moyen d'indicateurs. Un bon indicateur doit répondre également à plusieurs conditions :
- sa pertinence : contribue-t-il effectivement au but recherché ?
- sa scienticificité / fiabilité : la construction de l'indicateur et les valeurs-sources de l'indicateur sont-elles crédibles et fiables ?
- sa robustesse : reste-t-il pertinent dans presque toutes les situations et conditions de milieu (grandes cultures, élevage, arboriculture, viticulture... plaines et montagnes...) ?
- sa reproductibilité : son protocole de calcul est-il applicable année après année ?
- sa sensibilité : une légère variation des pratiques agricoles se traduit-elle par une légère évolution de l'indicateur ?
- son intelligibilité : l'indicateur est-il compréhensible et accepté par tous les acteurs ?
Enfin, idéalement, il devrait faire l'objet d'un large consensus et être d'un faible coût de collecte et de contrôle administratif.