Étape 2 : Construction des enjeux de performances
Les définitions du mot « enjeu » sont variées en fonction du contexte auquel l’enjeu se rattache. Le dictionnaire de l’Académie Française le voit comme « ce qui fait l'objet d'une compétition, d'un affrontement, d'une discussion. » (Académie française, 2005). Dans le cadre de l’analyse intégrée, les enjeux de performances décrivent, pour les acteurs concernés, les conditions nécessaires à la légitimité et à l’acceptabilité d’un système, ce dernier étant l’entité où le problème prend place. Nous appliquons le modèle tétraédrique développé par O’ Connor (2006) pour les déterminer et les structurer.
Les analyses de la durabilité mettent souvent en évidence l’interdépendance entre trois sphères d’organisation : l’économique, le social et l’environnemental. En s’appuyant sur les travaux de Passet (1979), O' Connor (2006) souligne la relation asymétrique entre ces trois « dimensions du développement durable », car l’économique est contenu dans le social, et les deux sont contenus dans la biosphère. L’environnement naturel existait avant qu’il existe une société humaine et ses institutions, et les institutions sociales sont, à leur tour, plus anciennes et plus larges que les marchés. Alors que la sphère économique de la production, de la consommation et de l’échange des biens et services reçoit souvent la plus grande importance dans les discours et les indicateurs politiques, sa viabilité dépend de la vitalité des sphères sociale (formes culturelles, liens symboliques, tissu social…) et environnementale.
Le modèle tétraédrique a pour particularité de compléter le cadre « traditionnel » des trois sphères de la durabilité par une quatrième : politique (voir figure 1). Cette dernière trouve sa légitimité dans l’émergence, au sein de la société, de conventions, de règles et de cadres institutionnels pour la régulation des sphères économiques et sociales et, indirectement, de la celle environnementale. Le rôle de cette quatrième dimension est de réguler les sphères économique et sociale dans leur fonctionnement propre et dans leurs relations avec la sphère environnementale. La sphère politique joue ainsi un rôle d’arbitre entre les demandes, différentes et parfois incompatibles, émanant des acteurs (O' Connor, 2006).
Figure1 :Le tétraèdre de la soutenabilité
(D’après (O' Connor, 2006), traduit en français par Maxim (2008))
L’ensemble des enjeux est déterminé en les ordonnant à l’interface de deux des quatre sphères de la durabilité (voir tableau 1).L’analyse concernant les relations entre deux dimensions est artificielle (les dimensions économique et politique ne peuvent pas être séparées de celle sociale, la dimension économique ne peut pas exister sans celle environnementale, etc.) mais didactique pour l’analyste (structuration de la pensée, approche systémique du problème). La description du fonctionnement interne de chaque sphère et la description des interactions entre les deux sphères sont complémentaires (O' Connor, 2006).
Tableau1 :Les quatre sphères et leurs interfaces
(D’après (O' Connor, 2006), traduit en français par Maxim (2008))
Chacune de ces interfaces peut être vue comme une étude de la « demande » et de l’« offre » de chaque sphère par rapport à l’autre. Cette analyse est d’abord fonctionnelle où l’on explore les rôles, les services ou les us attendus ou recherchés par les acteurs concernés pour maintenir la viabilité du système. L’analyse va aussi se baser sur des valeurs anthropologiques, symboliques ou morales, qui permettent de souligner les raisons, les principes et les objectifs moteurs de ces offres et demandes.Autrement dit, nous nous intéressons aux fonctions nécessaires pour maintenir la viabilité du système, dont font partie les fonctions environnementales.